TD 5 : Définir sa problématique et ses hypothèses 

Objectifs :

-Distinguer entre une problématique et des questions de recherche.

-Savoir formuler une problématique.

-Proposer des réponses provisoires.

  1. Définition de la problématique: Problématiser c’est identifier l’ensemble des éléments qui posent problème dans un certain champ (domaine, sujet donné, méthode de travail empruntée, etc.). Soutenir que tel ou tel phénomène ‘pose problème’ permet de supposer une incohérence ou une incomplétude de l’élément en question, une difficulté théorique ou pratique dont la solution n’a pas encore été trouvée. A moins que la solution existante soit insatisfaisante, voire contradictoire, à la lumière de données, de méthodes, de théories nouvelles.

Exemple : du constat des difficultés des apprenants de 4ème A.M  à rédiger des textes argumentatifs en FLE, découlent des remarques qui peuvent orienter la réflexion sur le travail collaboratif et son effet sur le développement des compétences scripturales.

  • La problématique n’est pas donnée à l’avance. Le chercheur doit par conséquent identifier le/les éléments qui posent problème en s’appuyant sur ses lectures (revue de la littérature) et en fonction de ses présupposés de recherche. Comme dans un sablier[1], l’élaboration de la problématique provient du parcours d’un champ plus large qui se voit rétrécir au fur et à mesure de l’approfondissement des lectures et qui permet, en aval, de nouvelles ouvertures lors du développement de la recherche, comme dans l’exemple suivant, où la problématique apparaît après le balayage d’un champ d’interrogations plus large qui montre l’étendue du sujet abordé :

2. Exemple d’une problématique:

Cette étude va s’attacher à mettre en regard deux approches : L’approche par le type de texte qui, insiste sur la connaissance des  caractéristiques propres au type informatif pour pouvoir rédiger ce  texte, elle  semble ainsi vouloir développer un certain type de compétences de rédaction. Et une autre approche qui consisterait à aider les élèves à construire la cohérence de leurs idées et qui permettrait, par conséquent, à l’apprenant de produire un texte informatif cohérent, cette approche s’appuie sur les travaux des deux chercheurs américains Hayes et Flower qui se sont intéressés, au début des années quatre vingt, aux opérations intervenant dans l’activité rédactionnelle et qui considèrent la production écrite d’un texte comme la mise en mots des idées cohérentes.  

S’interroger sur l’effet de deux approches « la linguistique textuelle » et « la psychologie cognitive » sur la production des textes informatifs par les élèves de première année moyenne, nous conduit à orienter notre problématique générale autour de deux axes fondamentaux représentés dans deux séquences différentes :

1. Effet de la reconnaissance des caractéristiques (structure interne et aspects linguistiques) du texte informatif sur la production de ce dernier.

2. Effet de l’activation des informations sur la production d’un texte informatif. 

La problématique étant le résultat d’un point de vue qui est appliqué au sujet d’étude, plusieurs hypothèses  peuvent être présentées à partir du même objet de recherche.

3.Les éléments constituants d’une problématique

La problématique est définie dans l’introduction du travail de recherche car elle permet de poser des jalons[2], de fixer des objectifs et d’attirer l’attention du lecteur. C’est  la problématique qui confère l’identité meme du travail de recherche entrepris.

La problématique identifie un secteur ‘incomplet’ dans les recherches antérieures faites par d’autres chercheurs dans le meme domaine et se positionne, donc, à l’intérieur de ce secteur. Ce positionnement peut se faire de manières différentes selon que le chercheur se situe en prolongement ou en rupture avec le champ de recherches par rapport auquel il définit sa problématique. Dans les deux cas, le chercheur doit avoir lu les travaux de ses prédécesseurs et montrer qu’il les a lus en construisant une revue de la littérature pertinente et en cohérence avec sa recherche.

La problématique est le lieu où le chercheur montre son originalité, ce qui le met souvent en position de « rupture » avec ses  prédécesseurs-dont la lecture s’avère néanmoins indispensable : on ne peut mesurer le degré d’originalité de son étude si l’on ignore les travaux antérieurs à sa recherche.

Le chercheur peut etre original en choisissant :

-d’aborder un problème d’un point de vue théorique qui n’a jamais été adopté auparavant ;

-d’appliquer une nouvelle méthode d’analyse ;

-de travailler sur un nouveau corpus d’application qui soulève des questions ou des difficultés inédites.

Dans l’introduction suivante tirée d’une thèse de doctorat, on voit clairement apparaître la revue de la littérature par rapport à laquelle l’auteur introduit une nouvelle problématique d’étude :

Exemple :

Nous  remarquons fort bien  que  les  recherches déjà citées  portent presque  toutes sur  un  corpus  très  limité  (2  corédacteurs) et dans une situation d’écriture simple. Cependant, notre recherche réunit un plus grand nombre de scripteurs (80 participants) qui ont bénéficié d’un dispositif didactique offrant un ensemble d’outils d’aide s’inscrivant dans une  optique  multimodale  (texte,  image  fixe,  vidéo) ; elle s’inscrit aussi dans une  optique  comparatiste  (écriture  individuelle/écriture  collaborative)  ce  qui  peut révéler au mieux les caractéristiques de chaque type d’écriture. Ainsi l’analyse des échanges  conversationnels  de  co-scripteurs  peut  répondre  au  souci  de l’enseignement de l’expression écrite  à  des  étudiants  de  français  langue  étrangère, au  besoin  de  former  les  futurs  enseignants  de  français  et  au  besoin  de  mieux mesurer  l’efficacité  de  ce  dispositif,  qui  donne  lieu  à  la  résolution  collective  et verbalisée de problèmes d’écriture, sur la pratique scripturale des étudiants.  

c-L’hypothèse de recherche

1. Définition : Elle représente la réponse anticipée que donne le chercheur à la problématique formulée. Elle est présentée sous la forme d’un énoncé déclaratif ou interrogatif qui précise une relation plausible entre des phénomènes observés ou escomptés[3]. Une recherche peut s’appuyer sur une ou sur plusieurs hypothèses distinctes ou découlant l’une de l’autre.

2. Exemple d’une hypothèse :

L’hypothèse générale que nous nous émettons, pour répondre à notre problématique   est la suivante :

-Les apprenants de 4ème année moyenne mis en contexte de rétroaction et de collaboration étayée développeraient  davantage leurs compétences rédactionnelles comparativement à ceux qui suivent un enseignement traditionnel en recevant les rétroactions de leur enseignant ou en absence de rétroaction c'est-à-dire en travaillant individuellement.

NB. -Le chercheur revient dans ses conclusions à l’hypothèse formulée en introduction (explicitement « nous faisons l’hypothèse que… » Ou implicitement) pour la  confirmer ou l’infirmer, ce qui ne représente pas un échec, les hypothèses infirmées peuvent donner lieu à de nouvelles hypothèses.

-Pour être pertinente et pour orienter de manière efficace la démonstration, une hypothèse doit être plausible, vérifiable, précise et suffisamment générale. L’hypothèse  déjà citée, concernant  le mode de travail collaboratif étayé, obéit à tous ces critères :

-elle est plausible car elle part d’un problème d’apprentissage bien circonscrit (observation en classe, entretiens, questionnaires,etc)

- l’hypothèse est précise, les termes évoqués (compétence, enseignement, rédaction) reflètent clairement le phénomène étudié ;

- elle est générale, car elle se rapporte à un groupe d’apprenants et non à un seul.

Attention : il ne faut pas confondre hypothèses et postulats, les premières devant pouvoir être démontrées tandis que les seconds représentent des données incontestables[4] ou considérées comme telles. L’arbitraire du signe linguistique représente un postulat (tandis que l’hypothèse, devrait pouvoir être vérifiée).

3. Applications :

Exercice1 : vous avez ci-dessous un résumé d’article. Complétez le tableau en indiquant l’objectif sur lequel porte la recherche ainsi que les références faites par l’auteur à la revue de la littérature.

Les temps du verbe sont l’objet de fréquentes mises au point théoriques et l’on ne compte plus les ouvrages ni les articles dans lesquels les tiroirs verbaux passé simple et passé composé sont décrits et commentés. Néanmoins, certains emplois de ces deux temps continuent de poser des problèmes à la description linguistique. M’appuyant –à la différence de la plupart des travaux existants-sur des faits de discours concrets, je me propose de revenir sur deux questions majeures : l’ambigüité du passé composé et son apparente synonymie avec le passé simple.

Texte

Objectif de la recherche

Références à la revue de la littérature

 

 

 

 

 Exercice2 : Les textes suivants sont tirés de propositions de communication formulées par de jeunes chercheurs en vue de participer à un colloque sur l’enseignement du FLE en contexte roumain (la formulation en français a été gardée telle quelle). Certaines maladresses dans la formulation de leur problématique sont à l’origine d’annotations de la part des membres du comité scientifique (a,b,c). Associez chacun des textes  à l’évaluation qui lui correspond.

  1.  A la veille de l’entrée de la Roumanie dans l’Union Européenne il devient de plus en plus évident pour chaque citoyen qui se veut européen qu’on ne peut plus s’intégrer dans une communauté plurilinguistique sans les outils fondamentaux de communication : les langues étrangères. Si le citoyen européen de demain (le Roumain par exemple) parle en plus de sa langue maternelle une seconde langue européenne et au moins une compréhension passive  d’une troisième, l’Europe de la diversité culturelle et linguistique sera une réalité au quotidien. 

Malgré cette nécessité évidente de promouvoir le plurilinguisme, trop souvent les enseignants des langues étrangères avouent qu’ils se heurtent à des difficultés apparemment insurmontables dans leur démarche instructive. Parmi ces difficultés on invoque un manque d’intérêt généralisé de la part des apprenants-surtout quand il s’agit des lycéens-qui fait presque impossible l’acquisition avec succès de langue étrangère en question. Quand même les enseignants, eux aussi, doivent avouer que, assez souvent, ils tentent d’ignorer l’opinion des apprenants à l’égard de leur objet d’étude et nous nous demandons si cette ignorance n’est partiellement responsable du manque de communication et, par la suite, d’intérêt dans l’apprentissage des langues étrangères…Essayer de trouver la réponse à des questions concernant les besoins, les difficultés, les attentes, les préjugés des élèves à l’égard (de l’étude) des langues étrangères serait à notre avis un point de départ vers une meilleure communication entre les participants à l’enseignement/apprentissage.

  1. Il ya dix ans que je quittais l’université pour entrer dans le corps des professeurs de FLE de Constanta. J’étais confiante, sûre de moi, décidée de révolutionner les pratiques  pédagogiques de tout le département de Constanta. Après peu de temps, je me suis redu compte qu’une révolution n’était pas si facile à faire  et j’ai dû reconnaître mon infatuation et reconsidérer ma position.

Vu cette expérience personnelle mon objectif est d’identifier une réponse à la question « quelle est la part de la formation initiale, de la formation continue, de l’expérience pédagogique dans le dispositif de formation d’un enseignant de FLE ? » D’autant plus qu’aujourd’hui, à la veille de l’entrée de la Roumanie dans l’Union Européenne, on parle  de nouvelles politiques d’enseignement en Europe, d’avancées en matière de didactiques, de CCER pour les langues étrangères, d’innovations pédagogiques.

 

A-     La problématique est intéressante et la façon de l’introduire originale ; cependant, elle est un peu trop large, il serait bien de la préciser davantage.

b-La pertinence de la problématique : Ok. La problématique est plutôt bien exposée (même si la formulation devrait être revue). On comprend bien l’intérêt empirique de cette recherche mais on peut se demander si la problématique proposée découle d’une conception théorique précise (méthode participative, etc.).

Corrigé:

Activité 1 :

Texte

Objectif de la recherche

Références à la revue de la littérature

1

Rediscuter sur la base d’un nouveau corpus l’ambigüité du passé composé et son apparente synonymie avec le passé simple. 

Les travaux portant sur la description du passé composé et du passé simple. 

 

Activité2 :

Texte « jeune chercheur »

Texte « évaluation »

1

b

2

a



[1] Petit appareil en verre, constitué de deux récipients communiquant par un étroit conduit où s'écoule du sable fin, qui sert à mesurer le temps.

[2] Ce qui sert de point de repère, d'étape dans un raisonnement, dans un processus : Données qui serviront de jalons pour ces recherches.

[3] Espérés

[4] Indiscutables

Modifié le: mardi 18 juillet 2023, 12:16