Séance 3: Le statut du narrateur application +corrigé
TD3. Le statut du narrateur/ la focalisation
Objectif :-reconnaitre les trois points de vue du narrateur (focalisation)
- Définition : C’est le point de vue selon lequel l’histoire est racontée. Il faut différencier entre un écrivain (l’auteur) et un narrateur (personnage fictif qui raconte l’histoire).
- Les types de focalisations : un écrivain peut raconter son histoire de trois façons différentes :
2.1. Le narrateur (le point de vue) omniscient : le narrateur sait tout des personnages, des lieux et du temps de l'action. Il voit tout et sait tout ; il connaît les pensées de tous les personnages, leur passé, présent et avenir. Le narrateur omniscient intervient très fréquemment dans la narration pour donner au lecteur des indications sur l'action ou les personnages.
2.2. Le narrateur (le point de vue) interne : Le narrateur ne raconte que ce que voit et ressent un personnage. Il est en mesure d'évoquer les sensations (visuelles, auditives, etc.), les réactions, les pensées du personnage. Autrement dit, le narrateur se glisse dans la conscience d’un personnage précis, dont il adopte la vision subjective,il ne dit que ce que sait le personnage. Ce point de vue est celui des narrations à la première (je) ou à la deuxième personne (tu), mais on le trouve aussi dans celles à la troisième personne (il).
2.3. Le narrateur (le point de vue) externe : le narrateur n'est qu'un témoin de l'action ; il ne peut donc raconter que ce qu'il voit sans être capable de formuler autre chose que des suppositions sur le caractère des personnages, leur histoire passée, etc. Il ne s'implique pas non plus dans l'action, Telle une caméra, il n’a pas accès à la conscience des personnages.. Cette semi ignorance transparaît dans les descriptions qui sont sommaires et superficielles (puisque le narrateur ne connaît pas les pensées des personnages ni leur psychologie)
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Focalisation interne |
Focalisation externe |
Focalisation omnisciente |
Pronoms personnels (sujet, compléments, etc. |
1 e personne : je, me, mon/ma/mes… 2 e personne : tu, te, ton/ta/tes… 3 e personne : il/elle, se, le/la, son/sa/ ses… |
3 e personne : il/elle, se, le/la, son/sa/ ses… |
3 e personne : il/elle, se, le/la, son/sa/ ses… |
Connaissance des lieux et temps de l'action |
Très peu d'informations sont données puisque le narrateur connaît le milieu dans lequel il évolue. Le lecteur peut les déduire des situations (mobilier, descriptions vestimentaires…) |
Les informations que l'on possède sont celles que voit le narrateur, il faut donc porter une attention toute particulière aux descriptions matérielles. |
On sait tout sur tout, le narrateur arrose le lecteur d'une foultitude de détails concernant les personnages, le milieu dans lequel il évolue et l'époque de l'action |
Caractères des personnages |
On ne connaît que les pensées et la psychologie (qui se développe peu à peu) du personnage à travers qui on vit l'action |
On ne sait absolument rien du caractère des personnages sinon à faire des conjectures à partir de leurs actions/paroles. |
On sait tout des pensées des personnages – même les plus intimes –, de leur évolution psychologique, etc. |
Vocabulaire employé |
Vocabulaire très subjectif (puisque la réception des actions est conditionnée par l'état d'esprit du personnage qui vit l'action) : abondance du vocabulaire péjoratif/mélioratif, du voc. des sensations (voir, entendre, etc.) et voc. cognitif (penser, croire, etc.) |
Vocabulaire objectif. Le vocabulaire cognitif est rare mais celui des sensations est assez développé. |
Mélange de vocabulaires objectif et subjectif ; objectif dans les descriptions matérielles et subjectif quant il s'agit de parler des motivations, des pensées, etc. des personnages. |
Application :
Activité1 : Dites à quelle personne est écrit chacun des textes, puis dites quel est le point de vue utilisé: interne, externe, omniscient. Justifiez en soulignant des mots ou des groupes de mots qui vous ont permis de répondre.
Texte 1 :
En1809, Mme Descoings, qui ne disait point son âge, avait soixante-Cinq ans. Nommée dans son temps la belle épicière, elle était une de ces femmes si rares que le temps respecte, et devait à une excellente constitution le privilège de garder une beauté qui néanmoins ne soutenait pas un examen sérieux.
Texte 2 :
A l’époque où commence ce récit, c’est-à-dire en 1756, j’avais quatorze ans. J’étais un robuste et jeune Léonard plutôt trapu et rouquin quant à la couleur des cheveux. J’aimais à marauder dans les champs et quand mon père me cherchait, la couleur de mes cheveux révélait ma présence. A Kerninon, la vie était sauvage, quelquefois féroce. La plupart des hommes vivaient de la pêche ou pillaient les épaves. J’ai couché bien des nuits en mer sous la grand voile repliée en forme de tente. Je m’endormais bercé par la haute musique de la mer bretonne. Certaines nuits cela miaulait si fort que mon père prêtait l’oreille: «Ecoute, écoute, Louis-Marie, Ecoute-les. Ils se plaignent, ils gémissent. Ils veulent quelque chose, mais quoi?».
Pierre Mac Orlan, Les Clients du bon chien jaune,1946
Texte 3 :
Deux hommes parurent. L’un venait de la bastille, l’autre du Jardin des Plantes. Le plus grand, vêtu de toile, marchait le chapeau en arrière, le gilet déboutonné, et sa cravate à la main. Le plus petit, dont le corps disparaissait dans une redingote marron, baissait la tête sous une casquette à visière pointue. Quand ils furent arrivés au milieu du boulevard, ils s’assirent, en même temps, sur le banc. Flaubert, Bouvard et Pécuchet, 1881.
Texte 4 :
A Deux heures, je suis allé à l’Assemblée. A ma sortie, une foule immense m’attendait sur la grande place. Les gardes nationaux qui faisaient la haie ont ôté leurs képis, et tout le peuple a crié:« Vive Victor Hugo!»J’ai répondu: «Vive la République ! Vive la France!»Puis cela a recommencé. Ils m’ont recommencé l’ovation de mon arrivée à Paris.
Victor Hugo, Choses vues
Texte5 : Holmes et Watson attendaient patiemment. Comme à leur habitude, ils espéraient que cela ne durerait pas trop longtemps et que le bruit se ferait bientôt réentendre. Conan Doyle, L’homme à la lèvre tordue.
Texte 6 :
Maintenant, je suis captif. Mon corps est aux fers dans un cachot, mon esprit est en prison dans une idée. Une horrible, une sanglante idée m’obsède. Je n’ai plus qu’une pensée, qu’une conviction, qu’une certitude: je suis condamné à mort!
Victor Hugo, Le dernier jour d’un condamné
Corrigé :
Texte1 :En1809, Mme Descoings, qui ne disait point son âge, avait soixante-Cinq ans. Nommée dans son temps la belle épicière, elle était une de ces femmes si rares que le temps respecte, et devait à une excellente constitution le privilège de garder une beauté qui néanmoins ne soutenait pas un examen sérieux.
-Texte à la 3ème personne du singulier «elle».
Le narrateur est donc extérieur au récit (Attention: cela n’est pas une règle générale car il existe des autobiographies à la troisième personne) Le narrateur connaît l’âge de Mme Descoings alors qu’elle le cache, connaît son passé (dans son temps), et émet des jugements sur elle («une beauté qui ne soutenait pas un examen sérieux»)=Le narrateur est donc omniscient.
Omniscient: on connaît le passé du personnage mais le narrateur ne nous fait pas partager la subjectivité du personnage.
Texte 2 :
A la 1 ère personne du singulier «Je». (exemples à relever en bleu)Le narrateur est personnage de l’histoire: il est intérieur au récit.- Tout est vu à travers les yeux de louis-Marie.=le point de vue est interne.
Texte 3 :
Deux hommes parurent. L’un venait de la bastille, l’autre du Jardin des Plantes. Le plus grand, vêtu de toile, marchait le chapeau en arrière, le gilet déboutonné, et sa cravate à la main. Le plus petit, dont le corps disparaissait dans une redingote marron, baissait la tête sous une casquette à visière pointue. Quand ils furent arrivés au milieu du boulevard, ils s’assirent, en même temps, sur le banc. Flaubert, Bouvard et Pécuchet, 1881.
Correction – Le texte est à la 3 ème personne. Le narrateur est donc extérieur au récit. - L’identité des personnages est inconnue: «deux hommes».Le narrateur ne décrit que l’aspect physique et les gestes des personnages dont il ne donne pas l’identité. Il semble les découvrir en même temps que nous. On ne connaît pas les pensées ni l’état civil des personnages.=Le point de vue adopté est externe. Externe:la scène est perçue comme un témoin neutre la verrait dans la rue
Texte4 : Interne: première personne.
Texte5 :Omniscient: «comme à leur habitude» indique que le narrateur connaît le rythme de vie des deux personnages. Comme il s’agit de deux personnages, ce ne peut être un point de vue interne (réservé à un seul personnage).
Texte6 : Interne: première personne